Studi Tributari Europei. Vol.9 (2019)
ISSN 2036-3583

Directive “ATAD” : une transposition, des questions…

Olivier LemaireCour administrative d’appel de Paris (France)

Premier conseiller, rapporteur public

Submitted: 2020-01-07 – Accepted: 2020-02-14 – Published: 2020-07-21

Short critical study of the implementation into the french tax law of the general anti abuse rule of the directive of July 12th n° 2016/1164/UE (i.e. ATAD directive). It introduces some provisions with the aim of fight against tax avoidance, that directly affect the functioning of the internal market

Brève étude critique de la transposition en droit français de la clause anti-abus générale de la directive n° 2016/1164/UE du 12 juillet 2016, établissant des règles pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale qui ont une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur, dite directive ATAD.

Keywords: ATAD; abus.

1 Introduction

La directive n° 2016/1164/UE du 12 juillet 2016, établissant des règles pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale qui ont une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur, habituellement désignée par l’acronyme « ATAD » (anti-tax avoidance directive), a été transposée en droit français, dans le délai fixé par son article 11, par la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018, portant loi de finances pour 2019.

Même si une étude générale présenterait l’intérêt d’être exhaustive (mais elle nécessiterait peut-être la rédaction d’une thèse…), nous prenons le parti de ne pas reprendre et commenter, les unes après les autres, d’une façon qui serait en définitive assez fastidieuse, l’ensemble des dispositions de transposition de l’ensemble des mesures de la directive. Nous préférons consacrer ces quelques lignes à un point précis : l’étude des dispositions de la directive dont la transposition a été la plus commentée parmi les fiscalistes français et qui soulève en effet le plus de difficultés en droit interne, celles de l’article 6 consacré à la clause anti-abus générale.

Les termes de l’article 6 de la directive ATAD sont bien connus : « 1. Aux fins du calcul de la charge fiscale des sociétés, les États membres ne prennent pas en compte un montage ou une série de montages qui, ayant été mis en place pour obtenir, à titre d’objectif principal ou au titre d’un des objectifs principaux, un avantage fiscal allant à l’encontre de l’objet ou de la finalité du droit fiscal applicable, ne sont pas authentiques compte tenu de l’ensemble des faits et circonstances pertinents. Un montage peut comprendre plusieurs étapes ou parties. / 2. Aux fins du paragraphe 1, un montage ou une série de montages est considéré comme non authentique dans la mesure où ce montage ou cette série de montages n’est pas mis en place pour des motifs commerciaux valables qui reflètent la réalité économique. / 3. Lorsqu’un montage ou une série de montages n’est pas pris en compte conformément au paragraphe 1, la charge fiscale est calculée conformément au droit national ».

C’est l’article 108 de la loi de finances pour 2019 qui a transposé ces dispositions. A cet effet, il a complété le code général des impôts par un article 205 A, dont les dispositions prévoient : « Pour l’établissement de l'impôt sur les sociétés, il n’est pas tenu compte d’un montage ou d’une série de montages qui, ayant été mis en place pour obtenir à titre d’objectif principal ou au titre d’un des objectifs principaux, un avantage fiscal allant à l’encontre de l’objet ou de la finalité du droit fiscal applicable, ne sont pas authentiques compte tenu de l’ensemble des faits et circonstances pertinents. / Un montage peut comprendre plusieurs étapes ou parties. / Aux fins du présent article, un montage ou une série de montages est considéré comme non authentique dans la mesure où ce montage ou cette série de montages n’est pas mis en place pour des motifs commerciaux valables qui reflètent la réalité économique ». Le même article 108 de la loi de finances pour 2019 prévoit que le nouvel article 205 A du code s’applique aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019, étant précisé, comme le souligne l’administration fiscale dans ses commentaires de l’article 205 A,1 que « la date à laquelle le montage a été mis en place est sans incidence pour apprécier si la clause anti-abus générale est applicable : cette dernière s’applique à toutes les opérations ayant une incidence sur le calcul du résultat des sociétés au titre de leurs exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019 ».

C’est peu de dire que la transposition a été fidèle. La France s’est manifestement rangée parmi les bons élèves puisqu’elle a adopté, mot pour mot, dans le délai qui lui avait été imparti pour ce faire, les dispositions de la directive, lesquelles étaient au demeurant suffisamment claires, précises et inconditionnelles. Le législateur français est toutefois allé au-delà de cette seule transposition en adaptant le droit en vigueur pour garantir la bonne insertion de ces nouvelles dispositions (I). Mais de nombreuses voix se sont élevées pour s’interroger sur un éventuel effet-papillon de cette transposition, laquelle, associée aux modifications apportées au droit jusqu’alors en vigueur, suscite un certain nombre d’interrogations et d’inquiétudes sérieuses, qu’il est impossible d’écarter d’un revers de la main et qui ne trouveront sans doute pas de réponse définitive avant quelques années (II).

2 Une transposition fidèle, qui s’est accompagnée d’une adaptation du droit en vigueur

2.1 L’étude de la transposition de l’article 6 de la directive ATAD et de ses effets nécessite, au préalable, une présentation rapide de l’arsenal de répression générale des abus de droit en vigueur antérieurement

Hormis quelques dispositifs épars intéressant des points très spécifiques, tels que celui du K du 6 de l’article 145 du code général des impôts (lequel rendait le régime fiscal des sociétés mères inapplicable aux produits des titres de participations distribués dans le cadre d’un montage ou d’une série de montages qui, ayant été mis en place pour obtenir, à titre d’objectif principal ou au titre d’un des objectifs principaux, un avantage fiscal allant à l’encontre de l’objet ou de la finalité du régime, n’était pas authentique compte tenu de l’ensemble des faits et circonstances pertinents), pour la plupart issus de la transposition de directives communautaires,2 le droit fiscal français ne connaissait de dispositions « anti-abus » générales qu’à l’article L. 64 du livre des procédures fiscales.

Aux termes de cet article, dans sa version antérieure à sa modification par la loi de finances pour 2019 : « Afin d’en restituer le véritable caractère, l’administration est en droit d’écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d’un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, si ces actes n’avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. / En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l’avis du comité de l'abus de droit fiscal. L’administration peut également soumettre le litige à l’avis du comité. / Si l’administration ne s’est pas conformée à l’avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification ».

Cet article L. 64 du livre des procédures fiscales a été modifié par la loi de finances pour 2019, mais sur un point étranger au sujet qui nous occupe : le législateur a supprimé le dernier alinéa précité, qui mettait la preuve à la charge de l’administration lorsqu’elle maintenait les rectifications contre l’avis du comité de l’abus de droit fiscal ; un alinéa dont la jurisprudence déduisait a contrario que la charge de la preuve incombait au contribuable dans le cas contraire, lorsque l’avis était conforme à la position du service.3

Cet article L. 64 du livre des procédures fiscales, qui s’applique de façon générale, est à la fois un article de procédure fiscale et un article d’assiette de l’impôt.

Un article relatif à l’assiette de l’impôt, d’abord, car il permet à l’administration fiscale de faire abstraction, pour le calcul de l’impôt dû, comme s’ils n’avaient tout simplement jamais existé, soit des actes fictifs (hypothèse de l’abus de droit par fictivité), soit des actes non fictifs mais qui n’ont été passés ou réalisés (par le contribuable ou non) qu’en vue d’une application littérale de textes ou de décisions à l’encontre des objectifs de leurs auteurs, sans aucun motif autre que celui d’éluder l’impôt qui aurait été normalement supporté sans ces actes (hypothèse de l’abus de droit par fraude).

L’abus de droit par fraude – celui qui aura fait couler le plus d’encre – n’est reconnu que lorsque deux conditions sont satisfaites. La première concerne le but en vue duquel les actes ont été passés ou réalisés : il doit être exclusivement fiscal, et non principalement. Pour apprécier cette première condition, le juge compare la situation du contribuable avant et après les actes en cause. Lorsque, hormis les effets fiscaux de ces actes, la situation du contribuable n’a guère évolué, le juge considère que la première condition est satisfaite. La jurisprudence est assez ferme, au sens où l’existence de buts autres que fiscaux fait obstacle à la reconnaissance d’un abus de droit par fraude. Elle fait toutefois preuve, parfois, d’un certain pragmatisme : elle regarde ainsi cette condition comme remplie même lorsque le contribuable a retiré de l’opération un avantage autre que fiscal, dès lors que cet autre avantage est « négligeable et sans commune mesure avec l’avantage fiscal » retiré de l’opération.4 En clair, cet avantage est tel qu’il ne constitue, de façon très marginale, qu’un effet collatéral favorable de l’opération, ce qui ne permet pas de le regarder comme ayant réellement constitué un but de cette opération.

La seconde condition tient aux intentions de l’auteur du texte ou de la décision dont l’application littérale est recherchée. Elle implique de rechercher les objectifs poursuivis par ces auteurs lors de l’adoption du texte ou de la décision.

Le respect de ces conditions doit être démontré par l’administration. Même lorsque le contribuable supporte la charge de la preuve en raison de l’avis du comité de l'abus de droit fiscal, l’administration doit pouvoir fonder sa position sur des éléments sérieux, faute de quoi le contribuable est regardé comme apportant la preuve qui lui incombe de l’absence de bien-fondé de la position du service vérificateur.

Si l’administration est pleinement tenue à cette démonstration lorsque l’abus de droit reproché correspond à un acte unique, elle peut se reposer sur les présomptions reconnues par la jurisprudence dans l’hypothèse du montage artificiel (à la condition, bien sûr, en amont, d’apporter des éléments de nature à établir l’existence d’un montage artificiel).

Défini comme « une série d’actes cohérents et convergents, passés en vue de créer une situation (…) économique artificielle à seule fin d’entrer dans les prévisions d’une disposition fiscale favorable »5 ou encore comme « une chaîne d’opérations complexes faisant intervenir des acteurs dépourvus de substance et créés pour l’occasion »,6 le montage artificiel permet de regarder comme établies non seulement, sauf preuve contraire, l’existence d’un but exclusivement fiscal,7 mais aussi – et de façon irréfragable, cette fois – la méconnaissance de l’intention des auteurs du texte ou de la décision, qui « ont nécessairement voulu appréhender une substance et non pas un artifice », selon les mots d’Édouard Crépey.8

Si la jurisprudence est sévère et apprécie strictement le respect des conditions légales, c’est au moins pour deux raisons essentielles.

La première tient aux lourdes sanctions infligées automatiquement aux contribuables. En application des dispositions du b) de l’article 1729 du code général des impôts, les impositions mises à la charge du contribuable sur le fondement de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales sont mécaniquement majorées d’une amende de 80 % en principe, ramenée par exception à 40 % « lorsqu’il n’est pas établi que le contribuable a eu l’initiative principale du ou des actes constitutifs de l’abus de droit ou en a été le principal bénéficiaire ». Le taux de la pénalité est donc variable, selon que le contribuable a eu ou non l’initiative principale de l’abus de droit ou en a été ou non le principal bénéficiaire. La charge de cette preuve incombe en toute hypothèse à l’administration.9 Mais le bien-fondé de la pénalité elle-même, indépendamment de son taux, dépend exclusivement de la confirmation de la rectification, contrairement aux pénalités pour manquement délibéré ou pour manœuvres frauduleuses, que l’administration fiscale ne peut infliger, en application des a) et c) du même article 1729 du code général des impôts, qu’à la condition d’établir l’existence d’une intention délibérée de se soustraire à l’impôt et, s’agissant des pénalités pour manœuvres frauduleuses, d’agissements destinés à l’égarer ou à restreindre son pouvoir de vérification.

L’autre raison pour laquelle le juge de l’impôt vérifie strictement que les éléments constitutifs de l’abus de droit sont réunis, c’est que l’article L. 64 du livre des procédures fiscales institue une procédure de rectification particulière, caractérisée par la possible consultation (sur demande de l’administration ou du contribuable) du comité de l’abus de droit fiscal, une instance présidée par un membre du Conseil d’État et composée de magistrats de la Cour de cassation et de la Cour des comptes, d’un avocat fiscaliste, d’un notaire, d’un expert-comptable et d’un professeur des universités. Cette procédure est dérogatoire à la procédure de rectification contradictoire de droit commun. Elle exclut en effet la compétence d’une autre instance souvent appelée à se prononcer en cas de désaccord entre le contribuable et l’administration fiscale, la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires, qui sert la plupart du temps de chambre de conciliation. Mais elle prévoit l’intervention du comité de l’abus de droit fiscal, composé d’éminents spécialistes,10 qui se prononcent sur l’existence des éléments constitutifs de l’abus de droit et, par suite, sur le bien-fondé de la mise en œuvre de la procédure de répression des abus de droit.

2.2 La transposition de l’article 6 de la directive ATAD a quelque peu bousculé les lignes de référence

Contrairement aux dispositifs particuliers que nous avons rapidement mentionnés pour mémoire, tels que l’article 145 du code général des impôts, le nouvel article 205 A du code général des impôts a vocation à s’appliquer de façon générale (même si son champ d’application se limite à l’impôt sur les sociétés), quel que soit l’avantage fiscal obtenu ou la règle de droit dont il a été fait application. De ce point de vue-là, il partage une même philosophie généraliste et se rapproche du dispositif de l’article L. 64, qui est aussi un dispositif anti-abus général. Et comme l’article L. 64 permet à l’administration d’écarter comme ne lui étant pas opposables les actes constitutifs d’un abus de droit, il lui permet de ne pas en tenir compte, ce qui nous paraît revenir au même, indépendamment de la différence lexicale. Ces deux articles permettent au service vérificateur de corriger a posteriori la déclaration d’un contribuable pour liquider à nouveau l’impôt dû comme si les actes en question n’avaient jamais été passés ou réalisés.

Au-delà du champ d’application, l’article 205 A du code général des impôts se distingue pourtant de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales sur quatre points essentiels.

En termes de procédure, d’abord. L’article 205 A n’est qu’un article relatif à l’assiette de l’impôt, il n’institue aucune procédure dérogatoire (il figure d’ailleurs au code général des impôts, et non au livre des procédures fiscales). Ainsi, il sera appelé à être mis en œuvre dans le cadre d’une procédure classique de rectification contradictoire ou, à titre exceptionnel, dans le cadre d’une procédure de taxation d’office (en cas d’absence de souscription ou de souscription tardive de la déclaration de résultats pour l’impôt sur les sociétés, sur le fondement de l’article L. 66, ou en cas d’opposition au contrôle, sur le fondement de l’article L. 74). Cette procédure de taxation d’office se caractérise par une détermination unilatérale par l’administration des bases imposables du contribuable, lequel est en principe privé des garanties offertes par la procédure de rectification contradictoire, et en particulier du dialogue avec le service, ainsi que par la dévolution particulière de la charge de la preuve, qui incombe systématiquement au contribuable lorsqu’il entend contester les impositions mises à sa charge. Autrement dit, cet article 205 A sera mis en œuvre sans intervention du comité de l’abus de droit fiscal, qui ne sera tout simplement pas compétent pour en connaître.

On peut le regretter : il n’aurait pas semblé anormal de permettre à tous les contribuables éventuellement concernés par une procédure de répression d’abus de droit de bénéficier des mêmes garanties procédurales. Le législateur français aurait d’ailleurs tout à fait pu ouvrir aux contribuables concernés par l’article 205 A du code général des impôts la possibilité de solliciter la saisine du comité de l’abus de droit fiscal. La transposition de l’article 6 de la directive ATAD, qui n’est qu’une disposition d’assiette, ne l’empêchait pas d’entourer la mise en œuvre de l’article 205 A de garanties de procédure particulières. Ce n’est pourtant pas ce qu’il a décidé.

Faut-il s’émouvoir de cette situation ?

Le contribuable sera certes privé du regard aiguisé d’experts reconnus en matière d’abus de droit, mais il bénéficiera en principe de la possibilité de faire valoir ses observations tout au long de la procédure contradictoire, et en particulier de la possibilité de soumettre son désaccord à la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires.

Cela étant, cette commission, certes présidée par un magistrat administratif, n’est pas nécessairement composée que de personnes au fait du droit fiscal. Par ailleurs, elle n’est en principe compétente pour se prononcer, conformément à l’article L. 59 A du livre des procédures fiscales, que si le désaccord entre le contribuable et l’administration porte sur le montant du résultat « déterminé selon un mode réel d’imposition » et sauf quelques rares exceptions (le caractère anormal d’un acte de gestion, le principe et le montant des amortissements et des provisions et le caractère de charges déductibles ou d’immobilisation), dans ce cadre, elle ne peut se prononcer que sur des questions de fait. La commission n’est compétente ni pour trancher une question de droit, ni pour trancher une question de qualification juridique des faits.

La commission, si elle doit être amenée à se prononcer, aura donc sans doute un champ de compétences plus restreint que le comité de l'abus de droit fiscal. Le comité, lorsqu’il est saisi d’un abus de droit pour fraude, est compétent pour vérifier que les deux éléments constitutifs sont réunis (à la fois l’existence d’un motif exclusivement fiscal et la méconnaissance de l’intention des auteurs du texte ou de la décision dont il a été fait une application littérale). A l’inverse, saisie d’une rectification fondée sur l’article 205 A, la commission des impôts directs pourra probablement émettre un avis sur cette question de fait qu’est l’existence d’autres objectifs que l’avantage fiscal, mais de sérieux doutes peuvent être nourris s’agissant de sa compétence pour se prononcer sur cette qualification juridique qu’est le « montage non authentique », sur cette autre qualification juridique qu’est le caractère « principal » de l’objectif fiscal et, plus certainement encore, sur cette question de droit qu’est la détermination de « l’objet ou de la finalité du droit fiscal applicable », à l’encontre duquel ou de laquelle le montage a été mis en œuvre.

Au fond, ensuite, l’article 205 A se distingue de l’article L. 64 car il n’envisage que l’hypothèse du « montage non authentique ». Cette notion devra être définie par la jurisprudence, en particulier à l’aide de la définition issue de la directive et fidèlement reprise à l’article 205 A. Il n’est pas absolument certain qu’elle corresponde tout à fait à ce que la jurisprudence fiscale française entend par « montage artificiel ». Seul l’avenir jurisprudentiel le dira. Ce que l’on peut remarquer pour le moment, c’est que le montage non authentique – en tant qu’il est défini comme n’ayant pas été mis en place pour des motifs commerciaux (entendus comme « économiques ») valables, « qui reflètent la réalité économique » – semble partager avec la notion de montage artificiel une idée d’artificialité, d’absence de substance économique. Il est donc tout à fait envisageable, sans vouloir présager de rien, que la jurisprudence essaye, dans toute la mesure du possible, de jouer le jeu de la cohérence, pour une question bien comprise de sécurité juridique, en rapprochant les deux notions.

Si l’article 205 A du code général des impôts se distingue de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales avec cette notion de « montage », c’est en réalité parce qu’il ne vise pas a priori l’hypothèse de l’acte unique et isolé, alors que, pour l’application de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales, un tel acte peut être constitutif d’un abus de droit. L’administration française, commentant le nouvel article 205 A du code général des impôts au bulletin officiel (qui, dans cette mesure, annonce la façon dont ces dispositions seront appliquées par les services fiscaux, qui se conforment à l’interprétation livrée par l’administration centrale), précise qu’il « s’applique indifféremment à une opération ou un acte isolé ou à des opérations ou actes pris dans leur ensemble ».11 Cette interprétation (qui ne nous semble pas pouvoir se prévaloir des dispositions de l’article 6 de la directive, qui ne visent que le « montage ») est toutefois discutable si l’on veut bien se souvenir que la jurisprudence française réserve la notion de montage à une « série d’actes » ou à une « chaîne d’opérations ».

Au fond, toujours, l’article 205 A permet surtout à l’administration fiscale de faire abstraction des montages mis en place en vue d’un but principalement fiscal. L’administration pourra en faire application même si le montage répond à des objectifs autres que fiscaux. Il s’agit là d’un assouplissement notable, qui tend vers une plus grande répression des abus.

Enfin, l’article 205 A du code général des impôts se distingue de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales en ce qu’il n’entraîne l’application d’aucune pénalité automatique. Il appartiendra donc à l’administration de déterminer, au cas par cas, si l’hypothèse à laquelle elle est confrontée justifie le cas échéant l’application d’une pénalité de 40 % pour manquement délibéré ou d’une pénalité de 80 % pour manœuvres frauduleuses, ces deux majorations étant respectivement visées au a) et au c) de l’article 1729 du code général des impôts. Il lui appartiendra surtout d’en justifier, en particulier devant le juge en cas de contestation, puisqu’elle supportera toujours la charge de la preuve de leur bien-fondé, en application de l’article L. 195 A du livre des procédures fiscales.

En résumé, l’article 205 A du code général des impôts complexifie assurément l’état du droit. Il institue un régime de répression à part, propre à l’impôt sur les sociétés, qui perturbe les canons traditionnels de l’abus de droit en France mais qui a essentiellement vocation à permettre la répression d’abus à but principalement fiscal, que l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ne pouvait pas – et ne peut toujours pas – légalement saisir.

Le législateur français ne s’est pas contenté de compléter le code général des impôts avec cet article. Il a bien sûr toiletté le code général des impôts (en abrogeant les dispositions du k du 6 de l’article 145), mais il est allé encore au-delà en modifiant le livre des procédures fiscales.

Par le même article 108 de la loi de finances pour 2019, dont les dispositions sont dans cette mesure codifiées au 9° bis de l’article L. 80 B du livre (et qui s’appliquent aux opérations réalisées depuis le 1er janvier 2019), il a d’abord ouvert au contribuable la possibilité, avant « la réalisation d’une opération », s’il estime qu’elle est susceptible de présenter un risque au regard de l’article 205 A du code général des impôts, de demander à l’administration « la confirmation » que cet article « ne lui est pas applicable ». A compter du dépôt « d’une présentation écrite, précise et complète de cette opération », l’administration dispose d’un délai de six mois pour répondre.

Si, dans ce délai, l’administration répond par la négative et émet donc un avis défavorable à la réalisation de l’opération, le contribuable se voit reconnaître par la jurisprudence la possibilité de solliciter un second examen (dans les conditions prévues par l’article L. 80 CB du livre des procédures fiscales), puis, le cas échéant, « lorsque la prise de position de l’administration, à supposer que le contribuable s’y conforme, entraînerait des effets notables autres que fiscaux », de saisir le juge d’une requête tendant à son annulation.12 Il n’est pas à exclure, compte tenu des enjeux économiques, que la jurisprudence accepte de regarder toute prise de position défavorable sur une demande présentée au regard de l’article 205 A du code général des impôts comme étant réputée remplir cette condition de recevabilité de la requête (comme elle l’a fait, par la même décision STE EXPORT PRESS, pour d’autres types de prises de position visés par le même article L. 80 B du livre des procédures fiscales).

En revanche, au terme du délai de six mois, l’absence de réponse explicite de l’administration équivaut à une réponse favorable, sous réserve que l’opération ait effectivement été présentée de façon complète et précise et à la condition que le contribuable ait été « de bonne foi ». Et cette réponse favorable implicite empêchera ultérieurement l’administration fiscale de procéder à « un rehaussement d’impositions antérieures ». Ce faisant, le législateur a donc permis aux contribuables de se prémunir contre toute remise en cause, sur le fondement de l’article 205 A du code général des impôts, des avantages fiscaux qu’ils ont éventuellement obtenus.

Il faut toutefois bien mesurer l’étendue de cette garantie.

Elle ne peut faire obstacle qu’au « rehaussement d’impositions antérieures ». Ce qui signifie qu’elle n’empêche pas l’administration de remettre en cause un avantage fiscal sur le fondement de l’article 205 A du code général des impôts lorsque le contribuable n’a été assujetti à aucune imposition, avant le contrôle, au titre de l’exercice correspondant. Si l’imposition résultant de la remise en cause d’un avantage fiscal sur le fondement de l’article 205 A est une imposition primitive, le contribuable ne pourra pas se prévaloir de la garantie prévue par l’article L. 80 B du livre des procédures fiscales pour y faire obstacle ou en demander la décharge.

Mais l’absence de réponse à l’issue du délai de six mois, qui, au regard de l’article L. 80 B, constituerait une réponse favorable implicite empêchant le service de faire application de l’article 205 A du code général des impôts, pourrait aussi l’empêcher de faire application de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales si la situation du contribuable devait également relever du champ de ces dispositions (nous évoquerons plus loin la combinaison de ces dispositions).

En effet, en vertu de l’article L. 64 B du livre des procédures fiscales, cette procédure de l’article L. 64 n’est pas applicable « lorsqu’un contribuable, préalablement à la conclusion d’un ou plusieurs actes, a consulté par écrit l’administration centrale en lui fournissant tous éléments utiles pour apprécier la portée véritable de cette opération et que l’administration n’a pas répondu dans un délai de six mois à compter de la demande ». Sur ce fondement, l’absence de réponse empêcherait l’administration de mettre en œuvre la procédure de l’article L. 64 non seulement pour assujettir le contribuable à une imposition supplémentaire, mais également pour l’assujettir à une imposition primitive.

Une réponse favorable explicite pourrait-elle éventuellement être opposée à l’administration qui entendrait faire application de l’article L. 64 ? Ce n’est pas à exclure, à la condition toutefois que la jurisprudence accepte que cette prise de position, bien qu’obtenue dans le cadre des dispositions du 9° bis de l’article L. 80 B du livre des procédures fiscales, soit aussi opposable sur le fondement du 1° du même article, qui rend applicable l’opposabilité des prises de position à l’administration « lorsque l’administration a formellement pris position sur l’appréciation d’une situation de fait au regard d’un texte fiscal ».

Cette extension nécessiterait un peu d’audace jurisprudentielle car il faudrait s’abstraire du fondement initial de la demande, présentée dans le cadre du 9° bis de l’article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; un cadre particulier qui, contrairement aux dispositions du 1°, prévoit une acceptation tacite à l’issue du délai de six mois.

Mais il n’y a là rien d’indépassable. Si le contribuable justifie d’une prise de position expresse, peu importe la façon dont il l’a obtenue (tant qu’il est de bonne foi et qu’il l’a obtenue régulièrement, sur la base d’un dossier précis et complet). Et cette extension serait tout à fait justifiée. On comprendrait mal qu’une administration ayant admis expressément l’absence de contrariété à l’objet ou à la finalité du droit fiscal applicable d’un avantage fiscal obtenu grâce à un montage, puisse ensuite librement considérer que l’intention de l’auteur du texte dont il a été fait application a été méconnue.

Simplement, l’opposabilité de la prise de position sur le fondement du 1° de l’article L. 80 B du livre des procédures fiscales dépendrait des mots employés. La jurisprudence refuse en effet, pour l’application de l’article L. 80 B, d’interpréter la prise de position et elle en fait une application stricte. Ainsi, si l’administration se contente d’écrire que l’opération n’appelle aucune remarque au regard de l’article 205 A, cette prise de position ne l’empêchera pas de faire application de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales, alors que si l’administration évoque de façon générale une absence de contrariété avec l’objet ou la finalité du texte sur le fondement duquel le contribuable entend bénéficier de l’avantage en cause, cette prise de position l’empêchera de considérer comme remplie cette condition, qui est également partagée par l’article 205 A et l’article L. 64.

Le législateur, ensuite, manifestement inspiré par la directive ATAD, a ajouté au livre des procédures fiscales, par l’article 109 de la loi de finances pour 2019, un article L. 64 A, aux termes duquel : « Afin d’en restituer le véritable caractère et sous réserve de l’application de l’article 205 A du code général des impôts, l’administration est en droit d’écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes qui, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ont pour motif principal d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, si ces actes n’avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. / En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige peut être soumis, à la demande du contribuable ou de l’administration, à l’avis du comité mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 64 du présent livre », c’est-à-dire au comité de l'abus de droit fiscal.

Le législateur a prévu une entrée en vigueur différée de ces dispositions, qui s’appliqueront « aux rectifications notifiées à compter du 1er janvier 2021 portant sur des actes passés ou réalisés à compter du 1er janvier 2020 ». Il a par ailleurs (naturellement) étendu la garantie prévue par l’article L. 64 B du livre des procédures fiscales, aux termes duquel (dans sa rédaction issue de la loi de finances pour 2019, qui s’appliquera elle aussi aux opérations réalisées à compter du 1er janvier 2020) : « Les procédures définies aux articles L. 64 et L. 64 A ne sont pas applicables » lorsque l’administration, bien que pleinement informée de l’opération envisagée, n’a pas pris expressément position dans un délai de six mois.

Cette initiative du législateur français – car la directive ATAD n’impliquait pas par elle-même un tel ajout – n’est pas le moindre des effets collatéraux de la transposition. C’est même celui qui est le plus débattu.

3 L’enfer est décidément pavé de bonnes intentions

Ce n’est pas la directive ATAD elle-même qui impliquait l’adoption de l’article L. 64 A du livre des procédures fiscales, mais une exigence d’égalité de traitement des contribuables, qui la rendait en réalité indispensable.

Il n’aurait en effet pas été envisageable qu’un contribuable exerçant à titre individuel (et non dans le cadre d’une société assujettie à l'impôt sur les sociétés) une activité dont les résultats sont ainsi imposables entre ses mains à l'impôt sur le revenu selon le régime des bénéfices industriels et commerciaux, ne soit exposé à la critique de l’abus de droit à raison d’un montage quelconque qu’en présence d’un but exclusivement fiscal, dans les conditions de l’article L. 64, alors qu’une société exerçant exactement la même activité, dont les résultats sont imposables à l'impôt sur les sociétés selon le même régime, applicable à cet impôt, puisse voir le service remettre en cause la même opération sur le fondement de l’article 205 A du code général des impôts, qui exige simplement que le but fiscal soit principal, voire même qu’il ne soit que l’un des buts principaux. On notera, sur ce dernier point, que l’administration fiscale française, dans ses commentaires sur l’article 205 A du code général des impôts,13 ne fait pas la distinction puisqu’elle considère que l’application de cet article nécessite la réunion de deux conditions : l’absence d’authenticité du montage et la mise en place du montage « avec pour objectif principal l’obtention d’un avantage fiscal allant à l’encontre de l’objet ou de la finalité du droit fiscal applicable ». Ce commentaire restreint à tort le champ d’application de l’article 205 A, qui évoque l’obtention de l’avantage fiscal comme « l’objectif principal ou (…) l’un des objectifs principaux ». Si l’avantage fiscal est un objectif principal parmi d’autres, il n’est pas l’ objectif principal de l’opération.

Par le nouvel article L. 64 A du livre des procédures fiscales, le législateur français a donc étendu le dispositif de l’article 205 A du code général des impôts au-delà du seul champ de l'impôt sur les sociétés. Le champ de ce nouvel article n’est limité à aucun impôt en particulier et à aucun contribuable en particulier. Il a donc vocation à s’appliquer de façon générale lui aussi, à l’instar de l’article L. 64 lui-même.

Il existe néanmoins deux différences essentielles entre l’article L. 64 et l’article L. 64 A, qu’il convient de relever immédiatement. D’une part, le premier vise aussi les abus de droit par fictivité, alors que le second ne traite que des abus de droit par fraude. Il faut souligner, à cet égard, qu’à la différence de l’article 205 A mais à l’instar de l’article L. 64, l’article L. 64 A ne vise pas que les « montages » et pourrait aussi être appliqué pour remettre en cause une situation fiscale résultant d’un acte unique et isolé. D’autre part et surtout, un abus de droit par fraude n’est constitué, au sens de l’article L. 64, qu’en cas de but exclusivement fiscal, alors que le but fiscal peut n’être que principal pour l’application de l’article L. 64 A (mais, contrairement à l’article 205 A, cet article n’envisage pas que le but fiscal puisse être l’un des objectifs principaux. Il doit être l’objectif principal unique).

Le nouvel article L. 64 A du livre des procédures fiscales suscite deux séries d’interrogations : les premières ont trait à sa constitutionnalité, les secondes à la combinaison de ses dispositions avec celles des deux autres dispositifs français anti-abus généraux : l’article L. 64 du même livre et, dorénavant, l’article 205 A du code général des impôts.

3.1 La constitutionnalité de l’article L. 64 A du livre des procédures fiscales en débat

C’est un ancien président de la section des finances du Conseil d’État, Olivier Fouquet, que certains décrivent avec mesure comme « le Grand Timonier de la fiscalité française »14 , qui a ouvert le bal des critiques en soutenant que le dispositif de l’article L. 64 A, qu’il qualifie de « mini-abus de droit », est certainement contraire aux droits et libertés garantis par la Constitution et en prévoyant une future contestation de la constitutionnalité de ce dispositif devant le Conseil constitutionnel à l’occasion d’une question prioritaire de constitutionnalité, qui ne manquera pas d’être soulevée d’ici quelques années, lors des premières contestations contentieuses de l’application de ce dispositif.15

Son raisonnement repose sur la censure par le Conseil constitutionnel du projet de loi de finances pour 2014 en tant qu’il modifiait l’article L. 64 du livre des procédures fiscales. Ce projet permettait à l’administration fiscale de mettre en œuvre la procédure de répression des abus de droit alors même que le motif fiscal des actes en cause n’était que principal. Par une décision du 29 décembre 2013,16 le Conseil a souligné qu’il appartient au législateur d’adopter « des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques afin de prémunir les sujets de droit contre une interprétation contraire à la Constitution ou contre le risque d’arbitraire, sans reporter sur des autorités administratives ou juridictionnelles le soin de fixer des règles dont la détermination n’a été confiée par la Constitution qu’à la loi ». Puis, il a jugé que la substitution du motif principalement fiscal au motif exclusivement fiscal avait « pour effet de conférer une importante marge d’appréciation à l’administration fiscale », contraire à la Constitution eu égard aux effets attachés à l’article L. 64 du livre des procédures fiscales, et en particulier à l’application mécanique de lourdes pénalités.

Croyant pouvoir garantir la constitutionnalité du nouvel article L. 64 A du livre des procédures fiscales, le législateur a refusé de modifier les dispositions du b) de l’article 1729 du code général des impôts, lesquelles renvoient uniquement à l’article L. 64, de sorte que les pénalités pour abus de droit ne peuvent pas être mécaniquement infligées à un contribuable assujetti sur le fondement de l’article L. 64 A. Mais, et il s’agit là du fondement même du raisonnement d’Olivier Fouquet, cette absence d’automaticité ne serait que de façade dans la mesure où l’administration, qui ne pourrait pas en principe légalement renoncer à une pénalité due (ce qu’en pratique, elle fait pourtant à chaque fois qu’elle transige avec un contribuable pour assurer le recouvrement de l’impôt au principal, c’est-à-dire très souvent…), sera contrainte, face à un « mini-abus de droit », d’infliger une pénalité pour manœuvres frauduleuses de 80 % ou, à tout le moins, une pénalité pour manquement délibéré de 40 % (dont les taux sont identiques à ceux des pénalités pour abus de droit). En effet, il semble pour le moins difficile de soutenir qu’un acte reconnu comme constitutif d’un abus de droit par fraude ne résulte pas nécessairement, au moins, d’une intention délibérée de se soustraire à l’impôt ; et lorsqu’il s’agit d’un montage artificiel et non plus d’un acte isolé, on peut probablement conclure sans difficulté à l’existence d’une telle intention doublée d’agissements destinés à égarer ou à restreindre le pouvoir de vérification du service, et donc, à l’existence de manœuvres frauduleuses. L’absence d’automaticité, censée garantir la constitutionnalité du nouvel article L. 64 A, ne serait ainsi qu’une illusion d’optique, qui ne résisterait pas à l’examen pointilleux du juge constitutionnel.

La doctrine n’est pas unanime sur cette question, et d’autres auteurs, à l’instar de Laurent Olléon, doutent d’une future censure. Plusieurs arguments pourraient en effet laisser penser que le Conseil constitutionnel renâclera à invalider le dispositif issu de la loi de finances pour 2019. Le premier est l’absence d’automaticité formelle quant à l’application des pénalités. Cet argument nous paraît sérieux. On peine, il est vrai, à imaginer une hypothèse où une rectification fondée sur l’article L. 64 A du livre des procédures fiscales pourrait ne pas justifier l’application d’une pénalité d’au moins 40 % pour manquement délibéré. L’absence d’automaticité, on l’a dit, est assez largement une illusion d’optique. Il n’en demeure pas moins qu’aucun texte ne prévoit dans ce cas l’application automatique de pénalités. Les pénalités ne résulteront donc pas mécaniquement de la loi, laquelle fait seule l’objet d’un contrôle de constitutionnalité, mais de l’application que décidera d’en faire le service, au regard de l’appréciation qu’il portera sur le comportement du contribuable.

Un autre argument nous semble tout aussi sérieux, qui relève pourtant davantage de l’opportunité que du droit (mais l’on sait bien – au moins depuis la lecture du livre que la sociologue Dominique Schnapper a consacré en 2010 aux neuf années qu’elle venait de passer à siéger au sein de cette instance – que ce type de considérations entre très largement en compte dans l’appréciation des juges constitutionnels français17). L’article 205 A du code général des impôts est couvert contre tout risque de censure de la part du Conseil constitutionnel, dès lors qu’il correspond à la transposition fidèle de dispositions claires, précises et inconditionnelles d’une directive communautaire et qu’en pareille hypothèse, une censure n’est possible que lorsque les dispositions mettent en cause une règle ou un principe inhérent à l’identité constitutionnelle de la France, ce qui n’est de toute évidence pas le cas. Il serait dès lors assez inopportun de censurer son article-jumeau, qui étend son dispositif aux autres impôts que l’impôt sur les sociétés, pour des motifs qui seraient tout aussi fondés s’agissant de l’article 205 A ; un article qui, lui aussi, en définissant l’abus à l’aide d’un but seulement principalement fiscal, laisse une importante marge d’appréciation, et qui surtout, lui aussi, sans entraîner l’application automatique de pénalités, s’accompagnera a minima, à n’en pas douter, de pénalités pour manquement délibéré (tout est affaire d’espèce, bien sûr, mais à la vérité, on peine à concevoir qu’un montage non authentique, au sens de cet article, ne puisse pas être regardé comme une manœuvre frauduleuse justifiant une pénalité de 80 %). On n’imagine d’autant moins le Conseil censurer l’article L. 64 A qu’il introduirait lui-même, ce faisant, une différence de traitement difficilement justifiable entre les contribuables, selon que les résultats de leur activité professionnelle, pourtant taxés selon le même régime, sont imposables à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu…

L’ultime argument est aussi d’opportunité. Il tient simplement au contexte, qui n’est plus tout à fait le même qu’il y a quelques années. La lutte contre la fraude fiscale n’est plus envisagée de la même manière et, face à la multiplication des abus et aux enjeux financiers sous-jacents, le législateur a notablement renforcé les pouvoirs de l’administration fiscale, avec l’aval du Conseil constitutionnel, et les juridictions font preuve de pragmatisme en acceptant d’adapter leur contrôle aux exigences contemporaines, constitutionnelles elles aussi, de la lutte contre la fraude fiscale.

Il est une autre exigence constitutionnelle, celle de la sécurité juridique, qui se trouve de facto quelque peu éprouvée par le flou qui entoure la question de la combinaison des trois dispositifs dorénavant codifiés aux articles 205 A du code général des impôts et L. 64 et L. 64 A du livre des procédures fiscales. La sécurité juridique implique, notamment, que les contribuables puissent connaître les risques qu’ils prennent et qu’ils puissent se faire une idée précise de ce qui les attend si ces risques se réalisent. Or, la coexistence de dispositifs potentiellement concurrents introduit une forte dose d’incertitude quant au texte applicable à leur situation.

3.2 Le service a-t-il dorénavant « le choix des armes » ?

Pour le dire simplement, entre le 31 décembre 2018 et le 1er janvier 2020, date de l’entrée en vigueur différée du nouvel article L. 64 A du livre des procédures fiscales, l’arsenal anti-abus de droit général de l’administration française aura donc triplé de volume, passant d’un article à trois. Ce n’est pas rien, et la combinaison de ces outils crée une incertitude et suscite donc une inquiétude assez largement justifiée, qui pose en particulier la question de savoir si le service pourra librement choisir l’un ou l’autre de ces outils.

Cette question, bien sûr, ne se pose que pour les opérations susceptibles d’entrer dans le champ d’application d’au moins deux de ces articles. Mais elles ne seront peut-être pas si rares. Qui peut le plus peut le moins : si le motif fiscal de l’opération est exclusif, on doit admettre que la condition tirée de l’existence d’un motif principalement fiscal est a fortiori évidemment remplie. Ainsi, un montage artificiel en matière d'impôt sur les sociétés, constitutif d’un abus de droit par fraude au sens de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales (en raison, donc, d’un motif exclusivement fiscal) pourrait entrer dans le champ de l’article L. 64 A du même livre et, a fortiori, dans le champ de l’article 205 A du code général des impôts. L’inverse, en revanche, n’est pas possible : il ne suffit pas de constituer un abus par fraude au sens de l’article L. 64 A ou de l’article 205 A pour entrer dans le champ de l’article L. 64. De même, tout abus de droit par fraude entrant dans le champ de l’article L. 64, indépendamment de l’impôt, et même s’il correspond à un acte isolé, pourrait aussi être écarté sur le fondement de l’article L. 64 A (à moins de considérer que l’article L. 64 A ne peut trouver à s’appliquer que s’il existe au moins deux motifs à l’opération, ce que la lettre du texte n’implique pas nécessairement). Il est d’ailleurs possible de supposer, avec Laurent Olléon,18 que l’administration pourrait avoir tendance à privilégier l’article L. 64 A à l’article L. 64, la condition d’exclusivité du but fiscal imposée par le second étant nettement plus difficile à établir que le caractère simplement principal du but fiscal, requis par le premier.

Nous nous éloignons en revanche de cet auteur lorsqu’il écrit que, si l’application des pénalités n’est pas « automatique en cas de mini-abus de droit, l’administration préférera, lorsqu’elle se sentira capable de démontrer l’existence d’un but exclusivement fiscal, emprunter le terrain de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales, qui, lui, entraîne de façon certaine l’application de la pénalité de 80 % pour abus de droit ». Selon nous, si l’administration préférera à l’inverse se fonder sur l’article L. 64 A, même en l’absence d’automaticité des pénalités, c’est parce qu’il vaut mieux, en toute rationalité, assurer le bien-fondé des droits que de bénéficier de l’application automatique, en raison de l’article L. 64, de pénalités qui seraient immanquablement déchargées par voie de conséquence si les droits, fragilisés par le choix d’un article aux conditions plus exigeantes, devaient être censurés par le juge. Ajoutons d’ailleurs – mais ce point devra lui aussi être éclairci par la jurisprudence – qu’il ne paraît pas tout à fait impossible, en l’état des textes, d’infliger au contribuable rectifié sur le fondement de l’article L. 64 A les pénalités prévues par les dispositions du b) de l’article 1729 du code général des impôts, jusqu’à présent réservées aux contribuables rectifiés sur le fondement de l’article L. 64.19 En effet, en vertu du b) de l’article 1729, la pénalité de 80 % (éventuellement ramenée à 40 %) est infligée « en cas d’abus de droit au sens de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ». Ainsi, si l’opération est constitutive d’un abus de droit tant « au sens de » l’article L. 64 qu’au sens de l’article L. 64 A, l’administration aura tout intérêt à privilégier l’article L. 64 A comme fondement légal de la rectification, en assortissant les droits d’une pénalité sur le fondement du b) de l’article 1729 du code général des impôts, quitte à envisager, en cas de doute, de solliciter une substitution de base légale pour voir le juge confirmer la pénalité sur le fondement des autres dispositions du même article.

La question de l’articulation des dispositifs peut être de première importance. Non pas seulement parce que l’application des articles L. 64 A du livre des procédures fiscales et 205 A du code général des impôts n’entraîne pas, formellement, l’application automatique de pénalités, contrairement à l’article L. 64, mais aussi parce que les garanties du contribuable diffèrent selon l’article appliqué à sa situation.

Seuls les articles L. 64 et L. 64 A permettent de solliciter l’avis du comité de l'abus de droit fiscal. Même s’il reste revêtu d’une forme d’autorité morale, en raison de la composition du comité, cet avis, qui avait toujours jusqu’alors un effet sur la charge de la preuve, a assurément perdu l’essentiel de cette importance au contentieux depuis que le législateur a décidé, par la même loi de finances pour 2019, de mettre fin à la connexion permanente entre le sens de cet avis et la charge de la preuve en modifiant l’article L. 192 du livre des procédures fiscales, en vertu duquel, désormais, si le comité est saisi d’un litige ou d’une rectification, « l’administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l’avis rendu ». Cette forme de déconnexion est aussi, au demeurant, de nature à inciter davantage l’administration fiscale à maintenir la rectification en dépit d’un avis défavorable et à « tenter le coup » devant le juge de l’impôt. Il n’en reste pas moins que l’avis du comité peut convaincre l’administration et la conduire à renoncer à la rectification. La possibilité de saisir le comité, qui s’offre à tout contribuable rectifié sur le fondement de l’article L. 64 ou de l’article L. 64 A, constitue donc une garantie, et la jurisprudence considère que la privation de cette garantie doit entraîner la décharge des impositions établies à l’issue de la procédure rendue ainsi irrégulière.

A l’inverse, l’article 205 A du code général des impôts n’ouvre pas cette possibilité. Il permet certes au contribuable de solliciter la saisine de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, dont l’avis peut avoir une incidence sur la charge de la preuve, dans les conditions de l’article L. 192 du livre des procédures fiscales. Mais cette garantie est loin d’être générale puisque la saisine, on l’a dit, n’est possible que si le désaccord entre dans le champ de compétences de cette instance.

C’est dire si la question du fondement légal est importante pour le contribuable. Elle l’est tout autant pour l’administration fiscale elle-même : on peut supposer qu’à l’application des articles 205 A du code général des impôts ou L. 64 A du livre des procédures fiscales, elle devrait privilégier, s’il n’y a aucun doute et que les conditions requises sont de toute évidence remplies, l’application de l’article L. 64 du même livre, lequel lui permet d’infliger des pénalités importantes de façon mécanique, sans se soucier d’avoir à justifier de leur bien-fondé autrement qu’en renvoyant au bien-fondé de la rectification. On notera toutefois qu’elle ne s’estime pas tenue de le faire, ainsi qu’il ressort de sa propre doctrine.20

En revanche, dans cette optique, elle n’aurait a priori aucun intérêt à recourir davantage à l’article L. 64 A qu’à l’article 205 A. La combinaison de ces deux articles n’intéresserait quasi exclusivement que le contribuable, en raison des garanties distinctes attachées à ces deux fondements légaux.

Le législateur a souhaité clarifier les choses et prévenir les difficultés. A cette fin, il a précisé, à l’article L. 64 A du livre des procédures fiscales, que cet article s’appliquait « sous réserve de l’application de l’article 205 A du code général des impôts ». Ces quelques mots nourrissent une littérature juridique relativement abondante. Ils peuvent signifier plusieurs choses.

Ils peuvent signifier, d’abord, que l’article L. 64 A ne peut tout simplement pas s’appliquer en matière d'impôt sur les sociétés puisqu’il existe un texte spécifique, l’article 205 A. Confronté à un contribuable assujetti à l'impôt sur les sociétés, le service n’aurait ainsi pas le choix entre ces deux articles, il serait tenu d’appliquer l’article 205 A.

Cette première interprétation est celle de l’administration fiscale elle-même. Dans ses commentaires sur l’article 205 A du code général des impôts,21 elle considère ainsi, sans motiver particulièrement sa position, que « la procédure prévue à l’article L. 64 A du livre des procédures fiscales, concerne tous les impôts, à l’exception de l'impôt sur les sociétés ».

Mais cette première interprétation ne s’impose pas avec la force de l’évidence à la seule lecture de l’article L. 64 A du livre des procédures fiscales, qui ne dit pas cela. On relèvera d’ailleurs, avec Laurent Olléon, que « rien, dans les travaux parlementaires, ne permet de retenir une telle interprétation ».22 Surtout, elle ne va manifestement pas dans le sens de l’intérêt du service. En effet, alors que l’article L. 64 A vise « les actes » constitutifs d’un abus de droit par fraude, l’article 205 A ne vise que les « montages ». Or, en droit fiscal français, on l’a dit, un montage est une « série d’actes », « une chaîne d’opérations ». Ainsi, interdire au service, en matière d'impôt sur les sociétés, de recourir à l’article L. 64 A au motif qu’il dispose de l’article 205 A reviendrait à faire échapper les actes isolés à la répression de l’abus de droit. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le motif d’exclusion (le service ne peut pas utiliser l’article L. 64 A parce qu’il dispose de l’article 205 A) n’est pas tout à fait pertinent. Il va sans dire que ces considérations seront probablement prises en compte lorsqu’il s’agira, pour le juge, d’interpréter le sens de la réserve figurant à l’article L. 64 A.

Cette réserve peut aussi signifier, ensuite, que le service ne peut plus faire application de l’article L. 64 A dès qu’il a décidé de mettre en œuvre les dispositions de l’article 205 A. Il devrait ainsi choisir avec soin le fondement légal de la rectification puisque, selon cette interprétation, il ne pourrait plus le modifier ensuite.

Il faut savoir, en effet, que l’administration fiscale doit, lorsqu’elle contrôle un contribuable et qu’elle lui propose de rectifier les déclarations qu’il a souscrites, motiver cette rectification et, en particulier, en mentionner le fondement légal. Mais après avoir été proposée au contribuable, la rectification fait en principe l’objet d’un débat contradictoire, auquel il n’est mis fin qu’avec la mise en recouvrement de l’imposition. Tout au long de ce débat, l’administration peut modifier la base légale de la rectification.23 Elle peut même, après la mise en recouvrement de l’impôt, en cas de contestation contentieuse et à tout moment de la procédure juridictionnelle, demander au juge de l’impôt de prononcer une substitution de base légale, ce qu’il fera si la base légale initiale est erronée, à la double condition que le contribuable soit mis en mesure de présenter ses observations sur cette nouvelle base légale et qu’il ait pu effectivement bénéficier de l’ensemble des garanties de procédure attachées au nouveau fondement légal,24 s’explique essentiellement par le caractère objectif du contentieux fiscal, qui n’oppose pas des intérêts subjectifs, particuliers, mais qui pose la question de savoir si, objectivement, le contribuable doit l’impôt qui lui est réclamé ou non.

Cette seconde interprétation de la réserve aurait ainsi pour effet d’empêcher l’administration, une fois qu’elle a fait son choix entre l’article L. 64 A du livre des procédures fiscales et l’article 205 A du code général des impôts, de revenir sur ce choix et de changer la base légale de la rectification. Cette interdiction ne serait pas anodine. Elle empêcherait par exemple un vérificateur de corriger l’erreur ayant consisté à rectifier un acte isolé sur le fondement du second article, alors qu’il aurait pu être rectifié sur le fondement du premier.

Toutefois, cette seconde interprétation de la réserve crée plus de difficultés qu’elle n’en règle. D’une part, elle ne paraît pas compatible avec cette possibilité constitutionnellement garantie à l’administration de modifier à tout moment la base légale des rectifications. Elle est même assez gênante et difficilement justifiable, compte tenu de la nature du contentieux fiscal. D’ailleurs, on ne voit pas vraiment la raison qui pourrait expliquer l’interdiction faite à l’administration de modifier la base légale. D’autre part, si cette interprétation devait être la bonne, il faudrait arriver à déterminer à quelle date placer la cristallisation du fondement légal, et il n’y aurait là rien d’évident : serait-ce la proposition de rectification, document notifié au contribuable après le contrôle et qui ouvre la procédure de rectification, ou bien la mise en recouvrement de l’impôt qui devrait fixer définitivement la position du service quant au fondement légal ? La détermination de cette date-couperet serait source de grandes difficultés.

Il y aurait une troisième interprétation, qui consisterait à permettre à l’administration d’appliquer soit l’un, soit l’autre des deux articles, sans pouvoir se prévaloir des deux concomitamment. Cette interprétation serait la plus neutre des trois en définitive.

Ce qui est certain, c’est que ces questions, qui conditionnent directement le bénéfice de garanties pour le contribuable, ne seront pas résolues rapidement car il faudra attendre que les premières applications des nouvelles dispositions soient contestées devant le juge, puis que la jurisprudence se forme sur ces questions et grave dans le marbre les réponses qu’il convient de leur apporter. Autant dire que la transposition de l’article 6 de la directive ATAD n’a pas fini de faire parler d’elle…


  1. BOI-IS-BASE-70, à jour au 3 juillet 2019↩︎

  2. les dispositions susmentionnées de l’article 145 du code résultaient de la transposition de la directive n° 2011/96/UE du Conseil du 30 novembre 2011 concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et aux filiales d’États membres différents, modifiée par la directive n° 2015/121 du Conseil du 27 janvier 2015↩︎

  3. Voir, par exemple : CE 9 octobre 2015, STE SOLITEL, n° 373654, Revue de droit fiscal, 2015 n° 50, comm. 731 ; RJF 1/16 n° 4↩︎

  4. CE 17 juillet 2013, MIN. C/ STE GARNIER CHOISEUL HOLDNIG, n° 352989, aux tables du Recueil Lebon, Revue de droit fiscal, 2013 n° 41, comm. 477 ; RJF 11/13 n° 1064↩︎

  5. Pierre Collin dans ses conclusions sur CE 18 mai 2005, MIN. C/ STE SAGAL, n° 267087, au Recueil Lebon, Revue de droit fiscal, 2005 n° 44-45, comm. 726 ; RJF 8-9/05 n° 910↩︎

  6. É. Bokdam-Tognetti, « Coquilles et abus de droit : les délices de la conchyliologie », RJF 11/13 p. 883↩︎

  7. CE 28 février 2007, MIN. C/ PERSICOT, n° 284565, au Recueil, Revue de droit fiscal, 2007 n° 14, comm. 386 ; RJF 5/07 n° 599↩︎

  8. CE Plénière 13 octobre 2017, VERDANNET, n° 396954, au Recueil, Revue de droit fiscal, 2018 n° 2, comm. 64 ; RJF 1/18 n° 70↩︎

  9. CE 29 septembre 2010, STE SNERR THÉÂTRE DE PARIS, n° 341065, aux tables du Recueil, Revue de droit fiscal, 2010 n° 45, comm. 551 ; RJF 12/10 n° 1219, qui se fonde sur l’article L. 195 A du livre des procédures fiscales↩︎

  10. « cénacle de hauts juristes, dont les avis sont publiés et font jurisprudence », selon les mots de Me Jérôme Turot, « Redressements en quête de motif. A propos des arrêts de la cour administrative d’appel de Paris dans l’affaire Wendel », Revue de droit fiscal, 2018 n° 23, comm. 295↩︎

  11. BOI-IS-BASE-70 du 3 juillet 2019↩︎

  12. CE Section 2 décembre 2016, MIN. C/ STE EXPORT PRESS, n° 387613, au Recueil, Revue de droit fiscal, 2017 n° 8, comm. 172 ; RJF 2/17 n° 168 : « il en va ainsi, notamment, lorsque le fait de se conformer à la prise de position de l’administration aurait pour effet, en pratique, de faire peser sur le contribuable de lourdes sujétions, de le pénaliser significativement sur le plan économique ou encore de le faire renoncer à un projet important pour lui ou de l’amener à modifier substantiellement un tel projet »↩︎

  13. BOI-IS-BASE-70, 3 juillet 2019↩︎

  14. L. Olléon, « Mini-abus de droit : la Campagne des Cent Fleurs ? », Revue de droit fiscal, 2019 n° 30-35, 344↩︎

  15. O. Fouquet, « Les deux nouvelles procédures de « mini-abus de droit » instituées par le projet de loi de finances pour 2019 sont-elles constitutionnelles ? », Revue de droit fiscal, 2018 n° 49, act. 519↩︎

  16. n° 2013-685 DC, Loi de finances pour 2014, Revue de droit fiscal, 2014 n° 1-2, comm. 70 ; RJF 3/14 n° 267 et 268↩︎

  17. Voir également E. Lemaire Papadopoulos, « Dans les coulisses du Conseil constitutionnel. Comment le rôle de gardien des droits et libertés constitutionnellement garantis est-il conçu par les membres de l’institution ? », Jus Politicum, n° 7, mars 2012.↩︎

  18. article précité↩︎

  19. voire même, d’assortir de ces pénalités des droits notifiés sur le fondement de l’article 205 A du code. Voir, partageant cet avis : Yves Rutschmann et Pierre-Marie Roch, « Transposition de la clause anti-abus générale en matière d’IS (CGI, art. 205 A) et nouvelle procédure d’abus de droit (LPF, art. L. 64 A) : les paradoxes de la réforme », Revue de droit fiscal, 2019 n° 3, comm. 116↩︎

  20. BOI-IS-BAS-70, 3 juillet 2019↩︎

  21. BOI-IS-BASE-70, 3 juillet 2019↩︎

  22. article précité↩︎

  23. CE 23 juillet 2010, MARMAJOU, n° 308019, aux tables, Revue de droit fiscal, 2010 n° 44, comm. 541 ; RJF 11/10 n° 1024↩︎

  24. CE 20 juin 2007, MIN. C/ SA FERETTE, n° 290554, aux tables, Revue de droit fiscal, 2007 n° 39, comm. 875 ; RJF 10/2007 n° 1131). Cette possibilité, qui a été jugée conforme à la Constitution (CE 12 juillet 2017, SARL LUPA PATRIMOINE FRANCE, n° 411264, Revue de droit fiscal, 2017 n° 37, comm. 442 ; RJF 11/17 n° 1096↩︎